2. Extrait de l'arrêt de la Cour de droit pénal dans la cause A. et Inconnue x, surnommée B., contre Ministère public central du canton de Vaud (recours en matière pénale) | |
6B_1325/2021 / 6B_1348/2021 du 27 septembre 2022 | |
Art. 6 EMRK, Art. 14 Abs. 3 lit. g UNO-Pakt II, Art. 32 BV und Art. 113 StPO; Selbstbelastungsprivileg ("nemo tenetur se ipsum accusare") und Recht zu schweigen; Verpflichtung, die Personalien anzugeben. | |
Art. 81 Abs. 2 lit. c, Art. 325 Abs. 1 lit. d, Art. 353 Abs. 1 lit. b StPO; inhaltliche Anforderungen an den Strafbefehl, insbesondere in Bezug auf die Bezeichnung der beschuldigten Person. | |
Art. 6 EMRK, Art. 29 und 29a BV, Art. 354 StPO; Anspruch auf Beurteilung durch eine richterliche Behörde; Verbot des überspitzten Formalismus. | |
Sachverhalt | |
A.a Par ordonnance pénale du 31 mars 2021, le Ministère public de l'arrondissement de La Côte a reconnu "Inconnu[e] x, alias B., de sexe féminin, de type caucasien, cheveux bruns, yeux foncés, numéro de profil signalétique: PCN y, sans domicile connu" coupable de ![]() ![]() | |
Il était en substance reproché à la prévenue d'avoir, à U./V., à tout le moins le 30 mars 2021, pénétré et occupé illégalement le site de W., puis refusé de donner suite, dans le délai imparti, à l'injonction du Tribunal civil de l'arrondissement de La Côte du 24 février 2021, définitive et exécutoire, et à celle de la police, de quitter les bâtiments et les parcelles y attenantes, propriétés de la société C. SA, sous la menace de la peine d'amende prévue par l'art. 292 CP. Il était en outre reproché à la prévenue d'avoir, au moment de son arrestation, refusé de décliner son identité, empêchant ainsi la police de procéder aux contrôles nécessaires objets de sa compétence.
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A.b Par acte du 12 avril 2021, l'avocate D., déclarant agir pour "Inconnue x, numéro de profil signalétique: PCN y", a formé opposition à cette ordonnance. Elle a annexé une procuration par laquelle cette inconnue "alias B." déclare la mandater, avec les annotations manuscrites suivantes: "X." et "7.04.2021" ainsi qu'un paraphe "[...]". Au pied de la procuration figure une déclaration manuscrite confirmant l'opposition, suivie de deux empreintes digitales.
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A.c Par avis du 5 mai 2021 adressé à Me D., le Ministère public a indiqué qu'il considérait l'opposition et la procuration comme viciées, dès lors qu'elles ne permettaient pas l'identification de la prévenue et lui a imparti un délai pour réparer le vice.
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Dans ses déterminations du 17 mai 2021, Me D. a notamment requis que le Ministère public prenne formellement acte de la nullité de l'ordonnance pénale ou, subsidiairement, de la validité de l'opposition. Elle a joint une photographie d'une personne.
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Par avis du 19 mai 2021, le Ministère public a déclaré maintenir son ordonnance pénale et a transmis le dossier au Tribunal de police de l'arrondissement de La Côte.
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B.
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Par courrier du 21 mai 2021, Me D. a informé le Tribunal de police qu'elle n'était plus mandatée et qu'elle était remplacée par Me A., avocat à Y.
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Par lettre du 25 mai 2021, l'avocat A. a déclaré être en charge des intérêts d'"Inconnue x" et a sollicité la communication du dossier, lequel lui a été transmis le 27 mai 2021.
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Me A. s'est déterminé par courrier du 16 juillet 2021. Il a annexé une procuration en sa faveur, du 27 mai 2021, non signée, mais comportant deux empreintes digitales.
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B.b Par prononcé du 20 août 2021, le Tribunal de police de l'arrondissement de La Côte a déclaré irrecevable l'opposition à l'ordonnance pénale du 31 mars 2021 formée le 12 avril 2021 par Me D., déclarant agir pour "Inconnue x", dit que l'ordonnance pénale rendue le 31 mars 2021 était exécutoire, ordonné le retour du dossier au Ministère public de l'arrondissement de La Côte et dit que la décision était rendue sans frais.
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Le Tribunal de police a en premier lieu rejeté l'argument de la nullité de l'ordonnance pénale querellée, au motif que cette dernière était dirigée contre inconnu et ne contenait pas l'identité du prévenu, conformément à l'art. 353 al. 1 let. b CPP. Il a jugé à cet égard, en référence à l'art. 81 al. 2 let. c CPP, qui prévoit de manière plus large une désignation suffisante des parties, qu'il suffisait que la personne soit identifiable. Tel était le cas en l'espèce, dès lors que "Inconnue x" était identifiable grâce à ses empreintes digitales et à son profil ADN, ces éléments étant suffisants pour assurer, le cas échéant, l'exécution de la peine. L'opposante était seule responsable du fait que son identité n'était pas complète, dès lors qu'elle avait refusé de la donner sans motif valable. L'art. 215 al. 2 let. a CPP lui imposait de décliner son identité, sans que cela porte atteinte au droit de ne pas s'auto-incriminer. En outre, l'opposition ne contenait que la signature de Me D. et ne répondait pas aux exigences déduites de la forme écrite, respectivement de la procuration écrite, découlant des art. 110 et 129 CPP, nonobstant un délai pour corriger le vice imparti en application de l'art. 110 al. 4 CPP. Il a enfin été relevé que "Inconnue x" avait été formellement avisée par le Ministère public, lors de son audition du 31 mars 2021, que sa décision de ne pas donner son identité la priverait des voies de droit ouvertes par la loi pour contester ![]() ![]() | |
B.c Par publication dans la Feuille des avis officiels (FAO) du 27 août 2021, le Tribunal de police a avisé "Inconnue x, numéro de profil signalétique: PCN y, sans domicile connu", que l'opposition déposée en son nom contre l'ordonnance pénale rendue contre elle le 31 mars 2021 avait été déclarée irrecevable.
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Le prononcé précité a en outre été notifié le 23 août 2021 à Me D. en qualité "d'auteur de l'opposition" et à Me A., en qualité "d'auteur des déterminations sur les questions de validité de l'ordonnance pénale et la recevabilité de l'opposition".
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C.
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C.a Par acte du 2 septembre 2021, Me A., prétendant agir au nom et pour le compte d'"Inconnue x, alias B., numéro de profil signalétique: PCN y", a recouru auprès de la Chambre des recours pénale du Tribunal cantonal vaudois contre le prononcé du 20 août 2021, en concluant, en substance, principalement, à sa réforme, en ce sens que la nullité de l'ordonnance pénale du 31 mars 2021 soit constatée et le dossier de la cause renvoyé au ministère public pour la suite de la procédure. A titre subsidiaire, il concluait à la réforme du prononcé attaqué en ce sens que des violations du droit de garder le silence soient constatées et que l'opposition à l'ordonnance pénale du 31 mars 2021 soit déclarée recevable, le dossier de la cause étant renvoyé au ministère public pour la suite de la procédure. En tout état de cause, il concluait à ce que les frais de la procédure de recours soient laissés à la charge de l'Etat et à l'octroi à la prévenue d'une indemnité équitable pour ses dépens.
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Il a produit un lot de pièces comprenant la procuration datée du 27 mai 2021 figurant déjà au dossier, le désignant notamment comme mandataire d'"Inconnue x, alias B., numéro de profil signalétique: PCN y", munie de deux empreintes digitales.
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C.b Par arrêt du 27 septembre 2021 (n° 901), la Chambre des recours pénale du Tribunal cantonal vaudois a déclaré le recours irrecevable et mis les frais d'arrêt, par 1320 fr., à la charge de Me A.
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D.
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D.a Par acte daté du 15 novembre 2021, Me A. (ci-après: le recourant n° 1), représenté par Me Gaspard Genton, forme un recours en matière pénale contre l'arrêt rendu le 27 septembre 2021 (n° 901) par la Chambre des recours pénale du Tribunal cantonal vaudois (6B_1325/2021).
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Il conclut, avec suite de frais et dépens, en substance, principalement, à l'annulation de l'arrêt attaqué, à l'annulation du prononcé rendu le 20 août 2021 par le Tribunal de police de l'arrondissement de la Côte, à ce que la nullité de l'ordonnance pénale du ministère public du 31 mars 2021 soit constatée et à ce que les frais et dépens de l'instance précédente soient mis à la charge du canton de Vaud. Subsidiairement, il conclut à l'annulation de l'arrêt attaqué, à l'annulation du prononcé rendu le 20 août 2021 par le Tribunal de police de l'arondissement de la Côte, à ce que soit constaté une violation du droit d'être entendu, une violation de la liberté d'expression, à ce que l'opposition à l'ordonnance pénale du 31 mars 2021 soit déclarée recevable, à l'annulation de dite ordonnance pénale, au renvoi de la cause au ministère public pour la suite de la procédure, et à ce que les frais et dépens de l'instance précédente soient mis à la charge du canton de Vaud. Plus subsidiairement, il conclut à l'annulation de l'arrêt attaqué et au renvoi de la cause à l'autorité précédente pour suite de la procédure de recours et pour qu'elle se prononce sur le fond. Plus subsidiairement encore, il conclut à la réforme de l'arrêt attaqué en ce sens que les frais de la cause sont mis à la charge de la partie qui succombe.
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Au préalable, il conclut à ce que soit ordonnée la jonction de la présente procédure avec celle évoquée ci-après.
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D.b Par acte daté du 15 novembre 2021, Me A., exposant agir pour "Inconnue x, alias B., numéro de profil signalétique: PCN y" (ci-après: la recourante n° 2), forme un recours en matière pénale contre le ![]() ![]() | |
Cette dernière conclut, avec suite de frais et dépens, en substance, principalement, à l'annulation de l'arrêt attaqué, à l'annulation du prononcé rendu le 20 août 2021 par le Tribunal de police de l'arrondissement de la Côte, à ce que la nullité de l'ordonnance pénale du ministère public du 31 mars 2021 soit constatée et au renvoi du dossier au ministère public pour la suite de la procédure. Subsidiairement, il conclut à l'annulation de l'arrêt attaqué, à l'annulation du prononcé rendu le 20 août 2021 par le Tribunal de police de l'arrondissement de la Côte, à ce que soit constaté une violation du droit de garder le silence, une violation du droit d'accès au juge, du droit à une défense effective, une violation de la liberté de réunion pacifique, à ce que l'opposition à l'ordonnance pénale du 31 mars 2021 soit déclarée recevable, à l'annulation de dite ordonnance pénale et au renvoi du dossier au ministère public pour la suite de la procédure. Plus subsidiairement, il conclut à l'annulation de l'arrêt attaqué et au renvoi de la cause à l'autorité précédente.
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E. Invités à se déterminer sur les recours précités, le Ministère public a conclu au rejet du premier (6B_1325/2021), tandis que la cour cantonale a conclu à cet égard au rejet du recours dans la mesure de sa recevabilité. S'agissant du second (6B_1348/2021), le Ministère public a conclu à son rejet dans la mesure de sa recevabilité, la cour cantonale ayant pour sa part conclu à son irrecevabilité.
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Les recourants nos 1 et 2 ont répliqué. Ils persistent en substance dans leurs conclusions.
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2.2 Aux termes de l'art. 81 al. 1 LTF, a qualité pour former un recours en matière pénale quiconque a pris part à la procédure devant ![]() ![]() | |
En l'espèce, dès lors que l'arrêt attaqué met à sa charge les frais de la cause devant l'autorité précédente, le recourant n° 1 a qualité pour recourir.
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S'agissant de la recourante n° 2, cette dernière revêt la qualité de prévenue (art. 81 let. a et b ch. 1 LTF). Est en particulier en cause, en ce qui la concerne, la garantie de l'accès au juge (art. 29, 29a Cst. et art. 6 CEDH), eu égard à la présente situation procédurale ayant trait à un arrêt déclarant irrecevable un recours contre un prononcé déclarant lui-même irrecevable une opposition à une ordonnance pénale. Il convient ainsi de lui reconnaître la qualité pour recourir et d'entrer en matière sur son recours, étant au demeurant relevé qu'il sied de laisser indécises, au stade de l'examen de la recevabilité, les questions de recevabilité formelles relatives à la procuration censée légitimer les pouvoirs de l'avocat prétendant la représenter devant le Tribunal fédéral (cf. art. 40 al. 2 et 42 al. 1 et 5 LTF), sachant que celles-ci se confondent avec la problématique qui figure au coeur du présent litige.
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Erwägung 4 | |
4.1 Conformément à l'art. 396 al. 1 CPP, le recours (au sens des art. 393 à 397 CPP) contre les décisions notifiées par écrit ou oralement est motivé et adressé par écrit, dans le délai de dix jours, à l'autorité de recours. L'art. 396 al. 1 CPP compte parmi les dispositions qui imposent de procéder en la forme écrite (cf. art. 110 al. 3 CPP; YASMINA BENDANI, in Commentaire romand, Code de procédure pénale suisse, 2e éd. 2019, n° 3 ad art. 110 CPP), à l'instar, du reste, de l'art. 354 al. 1 CPP, s'agissant de l'opposition (ATF 142 IV 299 consid. 1.1). ![]() ![]() | |
Aux termes de l'art. 129 CPP, dans toutes les procédures pénales et à n'importe quel stade de celles-ci, le prévenu a le droit de charger de sa défense un conseil juridique au sens de l'art. 127 al. 5 CPP (défense privée) ou, sous réserve de l'art. 130 CPP, de se défendre soi-même (al. 1). L'exercice de la défense privée exige une procuration écrite ou une déclaration du prévenu consignée au procès-verbal (al. 2).
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Sous forme écrite, la procuration doit indiquer le nom du client, celui de l'avocat mandaté par ce dernier et comporter la signature du client, respectivement remplir les conditions des art. 13 à 15 CO (arrêt 6B_525/2008 du 4 septembre 2008 consid. 2 [enlien avec les art. 40 al. 2 et 42 al. 5 LTF];MAURICE HARARI, in Commentaire romand, Code de procédure pénale suisse, 2e éd. 2019, n° 22 ad art. 129 CPP).
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Les recourants font néanmoins état des spécificités de la cause, en qualifiant l'ordonnance pénale du 31 mars 2021 de "premier des maillons de l'étrange chaîne procédurale qui amène au[x] présent[s] recours". On doit toutefois relever d'emblée que la situation procédurale inédite qui singularise la présente cause se trouve en réalité liée au refus de la recourante n° 2 de décliner son identité. D'un point de vue purement objectif, ce refus est en effet aussi bien à l'origine du libellé de l'ordonnance pénale en cause, s'agissant de la désignation de la recourante n° 2, que du motif d'irrecevabilité retenu dans l'arrêt attaqué - et avant lui dans le prononcé du Tribunal de police de l'arrondissement de La Côte du 20 août 2021 -, puisque celui-ci repose sur l'absence de procuration désignant nommément l'intéressée ![]() ![]() | |
5.1.1 L'art. 113 al. 1 CPP concrétise au plan législatif le principe de non-incrimination ("nemo tenetur se ipsum accusare"), tel qu'il est exprimé à l'art. 14 par. 3 let. g du Pacte ONU II (RS 0.103.2), et déduit des art. 6 par. 1 CEDH, ainsi que 32 Cst. Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, qui coïncide avec celle de la Cour européenne des droits de l'homme, cette garantie fait partie des normes internationales généralement reconnues qui se trouvent au coeur de la notion de procès équitable aux termes de l'art. 6 par. 1 CEDH, dont elle découle directement (ATF 148 IV 205 consid. 2.4; ATF 147 I 57 consid. 5.1; ATF 144 I 242 consid. 1.2.1; ATF 142 IV 207 consid. 8.2 et 8.3; arrêts 6B_1202/2021 du 11 février 2022 consid. 1.8.2; 6B_1414/2020 du 11 août 2021 consid. 1.1; 6B_289/2020 du 1er décembre 2020 consid. 7.8.1; 6B_48/2020 / 6B_49/2020 du 26 mai 2020 consid. 5.1; 6B_1297/2017 du 26 juillet 2018 consid. 3.1, in SJ 2019 I p. 229; arrêts de la CourEDH Sievert contre Allemagne du 19 juillet 2012 [requête n° 29881/07] § 61; John Murray contre Royaume-Uni du 8 février 1996 [GC] [requête n° 18731/91], Recueil CourEDH 1996-I p. 30 § 45; Saunders contre Royaume-Uni du 17 décembre 1996 [GC] [requête n° 19187/91], Recueil CourEDH 1996-VI p. 2044 § 68; Funke contre France du 25 février 1993 [requête n° 10588/83], série A vol. 256A § 44; J. B. contre Suisse du 3 mai 2001 [requête n° 31827/96], Recueil CourEDH 2001-III p. 457 ss § 64; cf. aussi ![]() ![]() | |
5.1.3 Le droit de ne pas contribuer à sa propre incrimination concerne en premier lieu le respect de la détermination d'un accusé à garder le silence et présuppose que l'accusation cherche à fonder son argumentation sans recourir à des éléments de preuve obtenus par la contrainte ou les pressions, au mépris de la volonté de l'accusé (arrêts de la CourEDH Saunders contre Royaume-Uni, § 68; Allan contre Royaume-Uni du 5 novembre 2002 [requête n° 48539/99], Recueil CourEDH 2002-IX p. 63 § 44; Heaney et McGuinness contre Irlande du 21 décembre 2000 [requête n° 34720/97], Recueil CourEDH 2000-XII p. 445 § 40; J. B. contre Suisse, loc. cit.; PIQUEREZ, loc. cit.). Il existe par conséquent un lien étroit entre le principe de non-incrimination et la présomption d'innocence, telle qu'elle est garantie par les art. 6 par. 2 CEDH, 32 al. 1 Cst. et 10 al. 1 CPP (cf. ATF 148 IV 205 consid. 2.4; ATF 147 I 57 consid. 5.1; ATF 144 I 242 consid. 1.2.1; ATF 142 IV 207 consid. 9.5; arrêts de la CourEDH Saunders contre Royaume-Uni, loc. cit.; Heaney et McGuinness, loc. cit.; PIQUEREZ, loc. cit.; cf. aussi MACALUSO/GARBARSKI, loc. cit.; VIKTOR LIEBER, in Kommentar zur Schweizerischen Strafprozessordnung StPO, Donatsch/Lieber/Summers/Wohlers [éd.], 3e éd. 2020, n° 7 ad art. 113 CPP; ![]() ![]() | |
5.1.4 Le droit de se taire n'est pas absolu. Il peut être restreint dans les limites du principe de proportionnalité, pour autant qu'il demeure respecté dans son essence (ATF 147 I 57 consid. 5.1; ATF 144 I 242 consid. 1.2.1; ATF 142 IV 207 consid. 8.4; cf. aussi arrêts de la CourEDH John Murray contre Royaume-Uni, § 47; Ibrahim et autres contre Royaume-Uni du 13 septembre 2016 [GC] [requêtes n os 50541/08, 50571/08, 50573/08 et 40351/09] § 269; Heaney et McGuinness contre Irlande, § 47). A cet égard, l'art. 113 al. 1, 3e phrase, CPP précise que le prévenu est tenu de se soumettre aux mesures de contrainte prévues par la loi. Le privilège de ne pas s'incriminer ne permet donc pas à l'intéressé de s'opposer aux mesures de contrainte ou à d'autres actes d'instruction prévus légalement (ATF 143 I 304 consid. 2, ATF 143 I 292 consid. 2.5.2.2; ATF 143 IV 270 consid. 7.9 et les arrêts cités; arrêts ![]() ![]() | |
5.2.3 Cela étant, le Tribunal fédéral a relevé que le Message du Conseil fédéral à l'appui du CPP distinguait expressément les données incriminantes de celles relevant de l'identification et indiquait que, si les prévenus n'avaient pas à se prononcer sur les accusations dont ils étaient l'objet, ils devaient en revanche décliner leur identité (arrêt 6B_1297/2017 précité consid. 3.2; Message du 21 décembre 2005 relatif à l'unification du droit de la procédure pénale, FF 2006 1057 ss, ![]() ![]() | |
5.2.4 Le Tribunal fédéral a également relevé (cf. arrêt 6B_1297/2017 précité consid. 3.4; cf. aussi arrêt 6B_70/2018 du 6 décembre 2018 consid. 1.3.3) que la doctrine majoritaire soutenait l'opinion selon laquelle les personnes bénéficiant du droit de se taire, tel le prévenu, avaient l'obligation de collaborer à l'établissement de leur identité (MARC ENGLER, in Basler Kommentar, Schweizerische Strafprozessordnung, 2e éd. 2014, n° 4 ad art. 113 CPP; LIEBER, op. cit., n° 17 ad art. 113 CPP; DANIEL HÄRING, in Basler Kommentar, Schweizerische Strafprozessordnung, 2e éd. 2014, n° 12 ad intro. art. 142-146 CPP et n° 6a ad art. 143 CPP; THORMANN/MÉGEVAND, in Commentaire romand, Code de procédure pénale suisse, 2e éd. 2019, n° 3a ad art. 143 CPP; SCHMID/JOSITSCH, Schweizerische Strafprozessordnung[StPO], Praxiskommentar [ci-après: StPO], 3e éd. 2018, n° 5 ad art. 143 CPP; GUNHILD GODENZI, in Kommentar zur Schweizerischen Strafprozessordnung StPO, Donatsch/Lieber/Summers/Wohlers [éd.], 3e éd. 2020, n os 22 s. ad art. 143 CPP; FRANÇOIS CHAIX, in Commentaire romand, Code de procédure pénale suisse, 2e éd. 2019, nos 7 et 10 ad art.?215 CPP; ULRICH WEDER, in Kommentar zur Schweizerischen Strafprozessordnung StPO, Donatsch/Lieber/Summers/Wohlers [éd.], 3e éd. 2020, n° 17 ad art. 215 CPP; REGULA SCHLAURI, Das Verbot des Selbstbelastungszwangs im Strafverfahren, Konkretisierung eines Grundrechts durch Rechtsvergleichung, 2003, p. 197 ss; contra: NIKLAUS OBERHOLZER, Grundzüge des Strafprozessrechts, 4e éd. 2020, p. 284 n. 908; JEAN-MARC VERNIORY, Les droits de la défense dans les phases préliminaires du procès pénal, 2005, p. 413 s.), certains auteurs nuançant l'obligation en cause en considérant que la personne entendue est tenue de collaborer à son identification tant qu'elle ne subit pas d'inconvénient de ce fait et que cela n'entre pas en contradiction avec le droit de ne pas s'auto-incriminer (ENGLER, loc. cit.; LIEBER, loc. cit.; HÄRING, loc. cit.; GODENZI, loc. cit. [sont ![]() ![]() | |
5.3 En l'espèce, les recourants invoquent différentes circonstances, allant de la nature et de l'ampleur de la sanction prononcée à l'encontre de la recourante n° 2 au risque de faire l'objet d'un fichage par les autorités, en passant par le risque de faciliter l'exécution de la sanction prononcée, comme autant d'éléments fondant des ![]() ![]() | |
Sauf dans les cas expressément prévus par la loi, il ne faut admettre la nullité qu'à titre exceptionnel, lorsque les circonstances sont telles que le système d'annulabilité n'offre manifestement pas la protection nécessaire. L'illégalité d'une décision ne constitue pas par principe un motif de nullité; elle doit au contraire être invoquée dans le cadre des voies ordinaires de recours (ATF 130 II 249 consid. 2.4; arrêts 6B_192/2021 précité consid. 2.2; 6B_667/2017 / 6B_668/2017 du 15 décembre 2017 consid. 3.1). Entrent avant tout en considération comme motifs de nullité l'incompétence fonctionnelle et matérielle de l'autorité appelée à statuer, ainsi qu'une erreur manifeste de ![]() ![]() | |
En outre, selon la jurisprudence constante, d'éventuels vices relatifs au contenu de l'ordonnance pénale n'entraînent en principe pas la nullité de cette dernière (ATF 148 IV 445 consid. 1.4.2; arrêts 6B_1408/ 2017 du 13 juin 2018 consid. 1.4.2; 6B_339/2017 du 19 juin 2017 consid. 3.2; 6B_667/2017 / 6B_668/2017 précité consid. 3.2; 6B_440/ 2015 du 18 novembre 2015 consid. 1; 6B_968/2014 du 24 décembre 2014 consid. 1).
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L'art. 81 al. 2 let. c CPP prévoit pour sa part, en ce qui concerne les jugements, que ceux-ci doivent contenir une désignation suffisante des parties et de leurs conseils juridiques ("eine genügende Bezeichnung der Parteien und ihrer Rechtsbeistände"; "una sufficiente designazione delle parti e dei loro patrocinatori").
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L'art. 325 al. 1 let. d CPP impose, pour l'acte d'accusation, que celui-ci désigne les noms du prévenu et de son défenseur ("die beschuldigte Person und ihre Verteidigung"; "l'imputato e il suo difensore").
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6.3.1 De façon générale, le contenu de l'ordonnance pénale, tel qu'il est défini par l'art. 353 CPP, se conçoit à l'aune de sa double fonction, soit celle de jugement en l'absence d'opposition (art. 354 al. 3 CPP), et celle d'acte d'accusation dans l'hypothèse contraire (art. 356 al. 1 i. f. CPP; ATF 148 IV 445 consid. 1.4.1; ATF 140 IV 188 consid. 1.4 ![]() ![]() | |
Bien que l'art. 353 CPP s'appréhende comme une lex specialis par rapport à l'art. 81 CPP (MOREILLON/PAREIN-REYMOND, CPP, Code de procédure pénale, 2e éd. 2016, n° 3 ad art. 353 CPP; YVAN JEANNERET, L'ordonnance pénale et la procédure simplifiée dans le CPP, in Procédure pénale suisse, Approche théorique et mise en oeuvre cantonale, Jeanneret/Kuhn [éd.], 2010, p. 87), le contenu de l'ordonnance pénale correspond pour l'essentiel à celui d'un jugement, régi quant à lui par ce même art. 81 CPP (GILLIÉRON/KILLIAS, in Commentaire romand, Code de procédure pénale suisse, 2 e éd. 2019, n° 1 ad art. 353 CPP; cf. aussi RIKLIN, op. cit., n° 4 ad art. 353 CPP; FF 2006 1057 ss, 1274 ch. 2.8.1 [ad art. 357 P-CPP]). La différence se focalise essentiellement sur les exigences de motivation qui, s'agissantde l'ordonnance pénale, se limitent à la révocation d'un sursis ou d'une libération conditionnelle (art. 353 al. 1 let. f CPP; GILLIÉRON/KILLIAS, loc. cit.; CHRISTIAN SCHWARZENEGGER, in Kommentar zur Schweizerischen Strafprozessordnung StPO, Donatsch/Lieber/Summers/Wohlers [éd.], 3e éd. 2020, nos 1 et 6 ad art. 353 CPP; SCHMID/JOSITSCH, Handbuch des schweizerischen Strafprozessrechts [ci-après: Handbuch], 3e éd. 2017, p. 610 n. 1358; MOREILLON/PAREIN-REYMOND, op. cit., n° 2 ad art. 353 CPP). L'ordonnance pénale doit en outre fournir les mêmes indications qu'un acte d'accusation (RIKLIN, op. cit., n° 4 ad art. 353 CPP). Elle correspond en d'autres termes à une version courte d'un jugement ou d'un acte d'accusation (SCHWARZENEGGER, op. cit., n° 1 ad art. 353 CPP; cf. aussi MOREILLON/PAREIN-REYMOND, op. cit., n° 2 ad art. 353 CPP).
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6.3.2 Les exigences fixées par l'art. 353 al. 1 let. b CPP concernant la désignation du prévenu traduisent implicitement une évidence: si la procédure pénale peut être ouverte contre inconnu (cf. parmi d'autres: GRODECKI/CORNU, in Commentaire romand, Code de procédure pénale suisse, 2e éd. 2019, n° 26 ad art. 309 CPP; SCHMID/JOSITSCH, StPO, op. cit., n° 10 ad art. 309 CPP), il ne saurait être question de punir un auteur qui le demeurerait, que ce soit dans le cadre d'une procédure ordinaire ou dans le cadre de la procédure de l'ordonnance pénale (DAPHINOFF, op. cit., p. 440; cf. aussi HEIMGARTNER/ ![]() ![]() | |
Or, face à la nécessité d'identifier et de désigner le prévenu, la question litigieuse est en l'occurrence celle de savoir si l'art. 353 al. 1 let. b CPP fixe, en mentionnant dans sa version française l'identité de celui-ci, des exigences spécifiques, en particulier par comparaison avec l'art. 81 al. 2 let. c CPP et la seule désignation suffisante des parties qui y est évoquée.
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6.3.2.1 La loi s'interprète en premier lieu selon sa lettre (interprétation littérale). Si le texte n'est pas absolument clair, si plusieurs interprétations sont possibles, il convient de rechercher quelle est la véritable portée de la norme, en la dégageant de tous les éléments à considérer, soit notamment des travaux préparatoires (interprétation historique), du but de la règle, de son esprit, ainsi que des valeurs sur lesquelles elle repose, singulièrement de l'intérêt protégé (interprétation téléologique) ou encore de sa relation avec d'autres dispositions légales (interprétation systématique).
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Le Tribunal fédéral ne privilégie aucune méthode d'interprétation, mais s'inspire d'un pluralisme pragmatique pour rechercher le sens véritable de la norme; il ne se fonde sur la compréhension littérale du texte que s'il en découle sans ambiguïté une solution matériellement juste (ATF 148 IV 148 consid. 7.3.1; ATF 147 V 35 consid. 7.1; ATF 146 IV 249 consid. 1.3; ATF 145 IV 17 consid. 1.2 et les références citées).
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6.3.2.2 En l'espèce, les textes allemand, français et italien de l'art. 353 al. 1 let. b CPP comportent des différences sensibles, puisque seul le texte français mentionne le terme d'"identité", alors que le texte allemand évoque la "désignation du prévenu" ("die Bezeichnung der beschuldigten Person") et le texte italien, uniquement le prévenu ("l'imputato"). En l'absence de formulation univoque, l'interprétation littérale de la disposition en question ne permet aucune conclusion sur la présente problématique. ![]() | |
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6.3.2.4 D'un point de vue téléologique et systématique, il convient de souligner que les exigences en la matière, fixées par l'art. 353 al. 1 let. b CPP, visent d'abord et avant tout à garantir que le prévenu soit clairement identifiable et à prévenir tout risque de confusion avec des tiers (GILLIÉRON/KILLIAS, op. cit., n° 2 ad art. 353 CPP; DAPHINOFF, op. cit., p. 441). De même, la désignation suffisante des parties prévue par l'art. 81 al. 2 let. c CPP vise à prévenir tout doute quant à l'identité exacte de ces dernières, le terme "suffisant" ayant quant à lui pour but d'éviter de tomber dans le formalisme excessif (MACALUSO/STOFFEL, in Commentaire romand, Code de procédure pénale suisse, 2e éd. 2019, n° 6 ad art. 81 CPP). Il faut en tout état que la désignation rende possible l'identification des parties (NILS STOHNER, in Basler Kommentar, Schweizerische Strafprozessordnung, 2e éd. 2014, n° 5 ad art. 81 CPP ). L'art. 325 al. 1 let. d CPP vise à son tour à permettre d'identifier le prévenu de manière indiscutable et d'exclure toute confusion (HEIMGARTNER/NIGGLI, op. cit., n° 12 ad art. 325 CPP; SCHUBARTH/GRAA, in Commentaire romand, Code de procédure pénale suisse, 2e éd. 2019, n° 19 ad art. 325 CPP; cf. aussi FF 2006 1057 ss, 1258 ch. 2.6.4.2 [ad art. 326 P-CPP]).
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Au vu de ce qui précède, il est patent que le but poursuivi au travers des art. 81 al. 2 let. c CPP, 325 al. 1 let. d CPP et 353 al. 1 let. b CPP est identique en ce qu'il se focalise sur la nécessité d'éviter tout risque de confusion. En outre, compte tenu de la double fonction de l'ordonnance pénale et du fait qu'elle correspond à une version courte d'un jugement ou d'un acte d'accusation, il serait contradictoire de fixer, pour l'ordonnance pénale, des exigences plus spécifiques en termes de désignation des parties. La mention du terme "identité" du prévenu dans le seul texte français de l'art. 353 al. 1 let. b CPP, à ![]() ![]() | |
6.3.2.5 Eu égard à la nécessité d'identifier le prévenu de manière à exclure tout doute ou toute confusion sur sa personne, une désignation nominative du prévenu avec ses données personnelles complètes, partant son nom et son prénom, avec indication de sa date de naissance, de son lieu d'origine, de son domicile, voire encore de sa filiation, doit constituer la règle (GILLIÉRON/KILLIAS, op. cit., n° 2 ad art. 353 CPP; DAPHINOFF, op. cit., p. 441; cf. aussi STOHNER, loc. cit.).
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Cette règle n'en demeure pas moins susceptible de se heurter à la réalité, qui réserve immanquablement son lot de configurations particulières et de difficultés pratiques, comme lorsque le prévenu est dépourvu de documents d'identité ou titulaire de faux documents, ou encore lorsqu'il apparaît sous différents alias (cf. à titre d'illustration: arrêts 1B_31/2022 du 11 février 2022 [prévenu dont le casier judiciaire mentionne quatre alias]; 6B_1031/2020 du 6 mai 2021 [prévenu apparaissant sous treize alias]; 6B_741/2020 du 11 novembre 2020 [identité incertaine et recours à une vingtaine d'alias]). L'importance de telles configurations, dans lesquelles l'identité du prévenu demeure en tout ou en partie inconnue, quelles qu'en soient les raisons, ne saurait être minimisée. Elles ne doivent pas pour autant être confondues avec l'hypothèse, clairement distincte, où la personne même de l'auteur demeure inconnue et où il n'est dès lors pas concevable d'engager l'accusation ou de rendre une ordonnance pénale (cf. supra consid. 6.3.2). En tout état, la procédure pénale ne saurait être paralysée du seul fait que (seule) l'identité de l'auteur n'est pas connue ou ne l'est que partiellement. Les rares auteurs qui abordent cette problématique précisent - en lien avec le contenu de l'acte d'accusation - qu'il convient alors de donner toutes les indications pouvant faciliter son identification ultérieure et permettant d'éviter des confusions avec d'autres personnes, tout en indiquant, le cas échéant, le pseudonyme du prévenu (SCHUBARTH/GRAA, op. cit., n° 19 ad art. 325 CPP). Cet avis doit être partagé, y compris en ce qui concerne le contexte de l'ordonnance pénale. En ce sens, lorsque les données personnelles du prévenu demeurent en tout ou en parties inconnues, il incombe à l'autorité de pallier ces éventuelles carences par toutes ![]() ![]() | |
Cela étant, les éléments pris en compte pour désigner la recourante n° 2, faute pour cette dernière d'avoir accepté de révéler son identité, comportent, outre une désignation générique spécifique sous forme de numéro et un alias, le genre de l'intéressée et la référence à un numéro de profil signalétique, permettant d'effectuer les comparaisons nécessaires à une identification (cf. art. 354 CP; art. 1 al. 2, 7 et 8 de l'Ordonnance du 6 décembre 2013 sur le traitement des données signalétiques biométriques [RS 361.3]). Ces éléments, bien qu'ils ne l'identifient pas nommément, permettent néanmoins de la désigner et de l'individualiser sans ambiguïté. A cet égard, il est manifeste que la solution retenue, qui revêt un caractère pragmatique et qui était somme toute dictée par les circonstances, ne laisse subsister aucun risque de confusion en ce qui la concerne. Par conséquent, dans ces circonstances particulières, la désignation en cause, qui résulte du refus de la recourante n° 2 de décliner son identité après avoir invoqué son droit de se taire, est demeurée conforme à l'art. 353 al. 1 let. b CPP. Il s'ensuit que le grief tiré d'une prétendue violation de l'art. 353 al. 1 let. b CPP s'avère mal fondé. Il en va donc de même de celui tiré de la prétendue nullité de l'ordonnance pénale à la base de la présente procédure, dont les recourants ne peuvent rien tirer en leur faveur.
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7. Invoquant les art. 6 CEDH, 29 et 29a Cst. et 354 CPP, respectivement 396 CPP, les recourants soutiennent que l'arrêt attaqué, en tant qu'il déclare irrecevable le recours cantonal contre un prononcé ![]() ![]() | |
Le Tribunal fédéral a eu l'occasion de souligner à maintes reprises les spécificités de la procédure de l'ordonnance pénale (art. 352 ss CPP) et la nécessité d'interpréter les dispositions topiques du CPP à la lumière de la garantie constitutionnelle (art. 29a Cst.) et conventionnelle (art. 6 par. 1 CEDH) de l'accès au juge, dont l'opposition (art. 354 CPP) vise à assurer le respect en conférant à la personne concernée la faculté de soumettre sa cause à l'examen d'un tribunal (cf. ATF 146 IV 30 consid. 1.1.1; ATF 142 IV 158 consid. 3.1 et 3.4; ATF 140 IV 82 consid. 2.3 et 2.6). De ce mécanisme procédural dépend la compatibilité de la procédure de l'ordonnance pénale avec la garantie en question, sachant au demeurant que l'ordonnance pénale se conçoit comme une proposition de jugement faite au prévenu en vue d'un règlement simplifié de la procédure pénale (ATF 147 IV 518 consid. 3.1; ATF 142 IV 158 consid. 3.4; ATF 140 IV 82 consid. 2.6; cf. aussi arrêts 6B_1290/2021 du 31 mars 2022 consid. 4.1; 6B_1095/2017 du 2 mars 2018 consid. 1.2; 6B_968/2014 précité consid. 2.1; 6B_152/ 2013 du 27 mai 2013 consid. 3.1; 6B_367/2012 du 21 décembre 2012 consid. 3.2; cf. parmi d'autres GILLIÉRON/KILLIAS, op. cit., n os 1 s. ad art. 352 CPP; SCHMID/JOSITSCH, Handbuch, op. cit., p. 607 n. 1352).
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L'opposition, qui n'est pas une voie de recours (au sens des art. 379 à 415 CPP), se conçoit comme un simple moyen ("Rechtsbehelf") susceptible de déclencher la procédure judiciaire dans le cadre de laquelle il doit être statué sur le bien-fondé des charges retenues contre le prévenu en marge de l'ordonnance pénale. La personne ayant qualité pour former opposition a droit et doit pouvoir compter sur une procédure conforme aux garanties de l'Etat de droit. Le ministère public assume, à l'issue de la procédure préliminaire clôturée par le biais d'une ordonnance pénale, la responsabilité du respect des principes régissant la procédure pénale (ATF 147 IV 518 consid. 3.1; ATF 142 IV 158 consid. 3.4; ATF 140 IV 82 consid. 2.6).
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Les limitations appliquées au droit d'accès à un tribunal, notamment en ce qui concerne les conditions de recevabilité d'un recours, ne doivent pas restreindre l'accès ouvert à l'individu d'une manière ou à un point tel que le droit s'en trouve atteint dans sa substance même. En outre, les limitations considérées ne se concilient avec l'art. 6 par. 1 CEDH que si elles poursuivent un but légitime et s'il existe un rapport raisonnable de proportionnalité entre les moyens employés et le but visé. En ce sens, si le droit d'exercer un recours est bien entendu soumis à des conditions légales, les tribunaux doivent, en appliquant des règles de procédure, éviter à la fois un excès de formalisme qui porterait atteinte à l'équité de la procédure, et une souplesse excessive qui aboutirait à supprimer les conditions de procédures établies par la loi (arrêts de la CourEDH Walchli contre France du 26 juillet 2007 [requête n° 35787/03] § 28 s.; Evaggelou contre Grèce du 13 janvier 2011 [requête n° 44078/07] § 19).
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Les recours doivent ainsi être admis sur ce point, ce qui dispense d'examiner les griefs de fond tirés notamment d'une prétendue ![]() ![]() ![]() |