8. Extrait de l'arrêt de la Ire Cour de droit civil dans la cause A. contre B., C. et D. SA (recours en matière civile) | |
4A_298/2021 du 8 novembre 2022 | |
Regeste | |
Art. 84 Abs. 1 und Art. 135 Ziff. 2 OR; Forderung in Euro; Unterbrechung der Verjährung durch ein Schlichtungsgesuch, worin die Forderung in Schweizer Franken beziffert ist.
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Der Gläubiger einer Fremdwährungsforderung unterbricht die Verjährung gültig, auch wenn er seine Forderung im Schlichtungsgesuch in Schweizer Franken formuliert hat (E. 6).
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Sachverhalt | |
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Le 4 novembre 2016, elle a allégué des faits nouveaux et pris de nouvelles conclusions en euros pour ces trois postes.
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Par jugement du 23 janvier 2017, le tribunal a rejeté les conclusions en francs suisses prises pour ces trois postes, au motif qu'elles auraient dû être libellées en euros puisque le préjudice était survenu en France, lieu de domicile de la demanderesse. Quant aux nouvelles conclusions libellées en euros, il les a écartées parce qu'elles ne reposaient pas sur des faits nouveaux allégués en temps utile conformément à l'art. 229 CPC, mais sur des faits allégués tardivement, après le second échange d'écritures. (...)
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Par arrêt du 7 novembre 2017, la Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève a déclaré l'appel de la patiente irrecevable en ce qui concerne les conclusions libellées en francs suisses, faute de critique motivée, et elle l'a rejeté en ce qui concerne les nouvelles conclusions en euros, parce que fondées sur des faits nouveaux invoqués tardivement.
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B. Par requête de conciliation du 28 mars 2018, soit après l'échéance du délai de 10 ans depuis l'opération, la patiente a introduit, pour ces mêmes trois postes de préjudice notamment, contre les mêmes défendeurs une seconde action en responsabilité libellée en euros. A la suite de l'échec de la conciliation, elle a déposé sa demande devant le Tribunal de première instance du canton de Genève le 8 août 2018.
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Après avoir limité la procédure aux questions de l'autorité de la chose jugée et de la prescription notamment, le Tribunal de première instance a, par jugement du 19 décembre 2019, rejeté les conclusions de la demanderesse libellées en euros. (...)
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Statuant le 20 avril 2021, la Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève a notamment rejeté l'appel de la demanderesse et a confirmé le jugement entrepris en ce qui concerne les trois ![]() ![]() | |
C. Contre cet arrêt, qui lui avait été notifié le 26 avril 2021, la demanderesse a interjeté un recours en matière civile au Tribunal fédéral le 26 mai 2021. (...)
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Le 8 novembre 2022, la Cour de céans a délibéré sur le recours en séance publique.
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Le Tribunal fédéral a admis le recours et annulé et réformé l'arrêt attaqué, en ce sens que l'exception de prescription soulevée par les défendeurs est rejetée. Il a retourné la cause à la cour cantonale pour suite de la procédure.
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(extrait)
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Erwägung 5.1 | |
5.1.1 Dans l' ATF 134 III 151, s'écartant d'une jurisprudence ancienne plus souple, le Tribunal fédéral a jugé, en se fondant sur l'art. 84 al. 1 CO, ![]() ![]() | |
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En l'espèce, l'autorité de la chose jugée du premier jugement ne faisait donc pas obstacle à la recevabilité de la seconde action libellée en euros.
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Les délais légaux de prescription fixent un terme aux actions, en mettant les défendeurs potentiels à l'abri des plaintes tardives peut-être difficiles à contrer, et tendent ainsi à empêcher l'injustice qui pourrait se produire si les tribunaux étaient appelés à se prononcer sur des événements survenus loin dans le passé, à partir d'éléments de ![]() ![]() | |
Aux termes de l'art. 135 ch. 2 CO, la prescription est interrompue lorsque le créancier fait valoir ses droits par des poursuites, par une requête de conciliation, par une action ou une exception devant un tribunal ou un tribunal arbitral ou par une intervention dans une faillite.
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6.2.1.1 Ainsi, il est nécessaire que la réquisition de poursuite permette d'individualiser la créance réclamée: elle doit énoncer le montant de la créance (qui doit être convertie en valeur légale suisse) et la cause de l'obligation si le créancier ne dispose d'aucun titre qui la documente (art. 67 al. 1 ch. 3 et 4 LP; ATF 121 III 18). Il n'est en revanche pas nécessaire que l'Office des poursuites auquel la réquisition de poursuite est adressée devienne ensuite actif ou qu'il communique l'acte au débiteur (ATF 144 III 425 consid. 2.1).
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De même, la requête de conciliation, respectivement la demande en justice lorsque l'action n'est pas soumise à conciliation selon les art. 198-199 CPC, doivent permettre d'individualiser la créance: elles doivent indiquer, dans leurs conclusions, le montant réclamé et, dans leurs allégués, le fondement de la créance. Si le créancier ne connaît pas encore le montant exact de sa créance, il doit réclamer le montant le plus élevé pouvant entrer en ligne de compte, à moins qu'il ne soit admis que la demande ne soit pas chiffrée (art. 42 al. 2 CO; ATF 133 III 675 consid. 2.3.2; ATF 119 II 339 consid. 1c/aa). Le montant chiffré indiqué dans la requête de conciliation, respectivement la demande, n'est donc pas nécessairement le montant exact, mais le montant maximal pour lequel le débiteur est avisé qu'il est appelé à répondre. L'effet interruptif se produit sans égard à la suite donnée à la procédure (ATF 142 III 782 consid. 3.1.3.2; ATF 118 II 479 consid. 3; ATF 114 II 261 consid. 2a).
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Lorsqu'une partie est inexactement désignée, ce défaut reste sans conséquence si son identité est clairement reconnaissable (en matière de poursuite, cf. ATF 102 III 63 consid. 2 et 3). Selon la jurisprudence rendue en matière d'interruption de la prescription par une requête de conciliation, la désignation inexacte d'une partie peut être rectifiée lorsqu'il n'existe dans l'esprit du juge et des parties aucun doute raisonnable sur l'identité de la partie, notamment lorsque l'identité résulte de l'objet du litige (ATF 142 III 782 consid. 3.2.1; ATF 114 II 335 consid. 3a et les arrêts cités). Cela présuppose évidemment que la requête de conciliation ait été effectivement communiquée à la partie qui a la qualité pour défendre, et non à un tiers, en d'autres termes que celle-ci en ait eu connaissance, à défaut de quoi il n'est évidemment pas possible de lui imputer qu'elle aurait compris ou dû comprendre, selon les règles de la bonne foi, que l'action a été ouverte contre elle (ATF 142 III 782 consid. 3.2.1). Il en va de même en cas d'inexactitude de la désignation d'une partie dans la demande.
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6.2.2 Dans la droite ligne de la jurisprudence susmentionnée et du principe de la confiance sur lequel repose la validité de l'acte interruptif en dépit de la désignation inexacte d'une partie qui affecte celui-ci, il y a lieu d'admettre que le créancier qui a adressé, en temps utile, à une autorité de conciliation une première action, libellée en francs suisses, pour une créance qui était due en monnaie étrangère, a valablement interrompu le délai de prescription puisqu'il a ainsi bien fait connaître à une autorité officielle son intention d'obtenir le paiement de sa créance et que son débiteur a bien compris cette intention, ou aurait dû la comprendre selon le principe de la confiance. La créance est suffisamment individualisée par son fondement, et les montants en francs suisses et en euros ne sont que les deux faces d'une même pièce. Cette solution s'impose aussi pour deux autres motifs: premièrement, une réquisition de poursuite (obligatoirement) exprimée en francs suisses interrompt valablement la prescription de la créance due en monnaie étrangère; deuxièmement, lorsqu'il est saisi de conclusions en paiement et en mainlevée, le tribunal prononce simultanément, pour la seule et même créance, une condamnation en monnaie étrangère et la mainlevée en francs suisses de l'opposition formée au commandement de payer (arrêt ![]() ![]() | |
Certes, il faut distinguer entre l'effet interruptif de la prescription, qui se produit à un moment donné, sans égard à la suite de la procédure, et qui a pour but la sauvegarde du droit lui-même, laquelle relève du droit matériel (art. 135 ch. 2 CO), et la rectification d'une erreur dans la procédure en cours, qui relève du droit de procédure (art. 132 al. 1 CPC). A la différence de la désignation inexacte d'une partie, qui peut être corrigée dans la procédure introduite (cf. consid. 6.2.1.2 ci-dessus), l'erreur concernant la monnaie due ne pourra être corrigée que par l'introduction d'une nouvelle requête libellée dans la correcte monnaie.
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6.3 En l'espèce, la patiente a communiqué par une requête de conciliation du 30 juin 2015, soit dans le délai de prescription de 10 ans (art. 127 CO), qu'elle entendait obtenir le paiement d'une créance en dommages-intérêts dont le fondement était le prétendu dommage causé par l'intervention chirurgicale qu'elle avait subie le 3 mai 2006. Elle a donc valablement interrompu la prescription par ses conclusions, même libellées en francs suisses, et ce sans égard à la suite de la procédure. Par conséquent, la seconde requête de conciliation du 28 mars 2018, portant sur la même créance et alors exprimée en euros, a été introduite en temps utile, de sorte que cette action n'était pas prescrite. ![]() |