32. Extrait de l'arrêt de la Ire Cour civile dans la cause X. SA contre époux A. (recours en réforme) | |
4C.275/2003 du 29 janvier 2004 | |
Regeste | |
Mietvertrag; Zession künftiger Mietzinse; Konkurs eines "Mitvermieters"; Betreibung auf Pfandverwertung; Rückzession; Aktivlegitimation (Art. 164 Abs. 1, Art. 544 Abs. 1 und Art. 545 Abs. 1 Ziff. 3 OR; Art. 806 Abs. 3 ZGB; Art. 204 SchKG).
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Der Vermieter, der sich Mietzinsansprüche "rückzedieren" liess, auf welche er vor der fiduziarischen Abtretung an eine Bank gemeinsam mit einem Dritten Anspruch hatte, ist legitimiert, allein gegen den Mieter vorzugehen und von ihm die Bezahlung seiner Schulden zu verlangen (E. 3).
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Bedeutung des Konkurses des "Mitvermieters", bzw. der Betreibung auf Verwertung des auf dem vermieteten Gebäude lastenden Pfandrechts, für die Abtretung künftiger Mietzinsforderungen, welche nach der Eröffnung des Konkurses, bzw. der Einleitung der Betreibung auf Pfandverwertung entstehen (E. 4).
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Sachverhalt | |
Le 15 décembre 1993, les époux A. ont cédé à la banque Y. (actuellement: la banque Z.; ci-après: Z.) les loyers versés par X. SA, afin de garantir un prêt hypothécaire alloué par cet établissement bancaire. La cession aurait été activée en 1995.
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Le 29 septembre 1997, sieur A. a été mis en faillite. Son épouse et lui-même ont également fait l'objet d'une poursuite en réalisation de gage immobilier intentée par Z., qui a requis la gérance officielle de l'immeuble sis à Renens. Instaurée le 1er septembre 1998, cette gérance a duré jusqu'au 30 juin 1999.
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L'immeuble litigieux a été vendu à des tiers, le 2 juillet 1999.
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B. Entre-temps, par requête du 15 mars 1999, les époux A., après avoir vainement tenté la conciliation, avaient assigné X. SA devant le Tribunal des baux du canton de Vaud en vue d'obtenir le paiement de 28'800 fr., intérêts en sus, à titre d'arriérés de loyer du ![]() ![]() | |
La défenderesse a contesté la légitimation active des demandeurs. L'instruction de la cause a été limitée à cette question.
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Le 15 mai 2001, Z. a adressé au conseil des demandeurs une lettre contenant le passage suivant:
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"Pour faire suite à votre demande, nous vous confirmons que la banque Z. rétrocède, par la présente, à Mme A.:
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- cession de l'ensemble des loyers produits par l'immeuble sis à Renens (...) contre la société X. SA, en vue de leur recouvrement par tout moyen juridique utile. Il va toutefois de soi que les montants en cause devront, le cas échéant, être payés directement en nos mains, la rétrocession n'intervenant qu'en vue de recouvrement."
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Par jugement préjudiciel du 22 mai 2001, le Tribunal des baux du canton de Vaud a rejeté la demande pour défaut de légitimation active.
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Statuant par arrêt du 4 décembre 2002, sur recours des époux A., la Chambre des recours du Tribunal cantonal vaudois a réformé partiellement le jugement de première instance, en ce sens qu'elle a nié la légitimation active de sieur A., mais admis celle de dame A. Cet arrêt repose, en substance, sur les motifs suivants: la légitimation active doit être examinée, non pas à l'ouverture d'instance, mais à la clôture de l'instruction. Il convient donc de tenir compte de la rétrocession des créances de loyer opérée le 15 mai 2001 par Z. en faveur de dame A. Cette rétrocession fiduciaire a été opérée valablement, de sorte que la demanderesse est devenue titulaire des créances rétrocédées. En soi, une cession de loyers ne peut avoir d'effet pour les loyers encaissés postérieurement à l'ouverture de la faillite du bailleur unique. En l'occurrence, toutefois, il y a deux bailleurs, formant une société simple, qui sont propriétaires en commun de la créance en paiement du loyer. La société simple a été dissoute par la faillite de l'associé sieur A. Cependant, on ignore tout de sa liquidation. Or, tant que la société n'a pas été liquidée, les créances restent la propriété commune des associés. La faillite ne dessaisit nullement la totalité des droits des associés, mais seulement les droits de l'associé failli. Aussi la cession antérieure des créances de loyer opérée par la société simple restait-elle pleinement efficace pour l'avenir. Cédées valablement à Z., ![]() ![]() | |
C. Agissant par la voie du recours en réforme, la défenderesse conclut principalement au rejet intégral de la demande et, subsidiairement, au renvoi de la cause à la cour cantonale pour complément d'instruction et nouveau jugement. Les moyens soulevés dans le recours en réforme seront exposés plus loin, dans la mesure utile.
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Les intimés proposent le rejet du recours.
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Le Tribunal fédéral a admis partiellement le recours, annulé l'arrêt attaqué et renvoyé la cause à la cour cantonale pour complément d'instruction et nouveau jugement dans le sens des considérants.
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A l'appui de son recours en réforme, la défenderesse soutient principalement que la rétrocession en cause était nulle en tant que telle. ![]() ![]() | |
Il y a lieu d'examiner successivement ces différents moyens.
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Erwägung 3 | |
Si le cessionnaire cède au cédant la créance qui lui a été transférée antérieurement par ce dernier, on parle de rétrocession (PROBST, op. cit., n. 3 ad art. 164 CO). Toutes les conséquences juridiques de la cession s'appliquent à la rétrocession (LACHAT, op. cit., n. 65).
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3.2 En l'occurrence, par l'effet de la cession du 15 décembre 1993, Z. est devenue titulaire unique des créances de loyer non encore échues découlant du contrat de bail passé entre les époux A. et la défenderesse. A compter de cette date, le pouvoir de disposition sur les créances cédées lui appartenait en propre et elle avait la faculté d'en user comme bon lui semblait à l'égard des tiers. C'est ce qu'elle a fait en rétrocédant lesdites créances à la seule demanderesse. La Chambre des recours retient, à ce propos, sans être critiquée par la défenderesse, qu'il n'existe pas de circonstances dont on pourrait inférer le caractère simulé, voire frauduleux, de la ![]() ![]() | |
Certes, on n'est pas en présence, dans le cas concret, d'une véritable rétrocession, Z. ayant cédé les créances de loyer à l'une seulement des personnes qui en étaient titulaires en main commune à l'origine. La validité de l'acte incriminé n'en est pas pour autant affectée. Dans la mesure où la défenderesse professe l'opinion inverse, en s'appuyant sur PROBST (ibid.), elle se trompe. L'auteur en question se borne à indiquer, dans le passage cité par la défenderesse, que la rétrocession ne peut pas être réalisée par une simple remise conventionnelle (art. 115 CO), mais nécessite une cession en sens inverse de la première. Il ne soutient pas, en revanche, comme le fait la défenderesse, qu'une rétrocession qui n'interviendrait pas au profit des mêmes parties cédantes initiales serait nulle.
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La cession de créance est un acte de disposition bilatéral reposant sur la manifestation réciproque et concordante des volontés du cédant et du cessionnaire. A défaut d'une telle manifestation, elle n'existe pas. Comme pour tout contrat, il y a lieu de rechercher la réelle et commune intention du cédant et du cessionnaire, sans s'arrêter aux expressions ou dénominations inexactes dont ils ont pu se servir (art. 18 al. 1 CO). Or, s'il est vrai que le terme de "rétrocession" utilisé par Z. dans l'acte écrit du 15 mai 2001 n'est pas tout à fait idoine - il l'est cependant en partie dès lors que la rétrocession s'est faite en faveur de l'un des cédants initiaux -, le texte de cet acte fait ressortir clairement que la banque entendait céder les créances de loyer à la seule demanderesse, qui y est désignée nommément. Aussi l'existence de cette cession n'est-elle pas sujette à caution. Il s'ensuit que la bénéficiaire de la rétrocession a acquis, par là même, les créances de loyer qui avaient été précédemment cédées à Z. Il conviendra d'examiner plus loin si la faillite de sieur A. a restreint l'étendue de cette cession (cf. consid. 4).
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Au bénéfice d'une cession valable de créances dont la cédante était l'unique titulaire, la demanderesse possédait ainsi, dès le 15 mai ![]() ![]() | |
En tant qu'il remet en cause la validité de la cession des créances portant sur les loyers échus durant la période comprise entre le 1er juin 1997 et le 28 septembre 1997 (veille du jugement de faillite), le recours interjeté par la défenderesse est dénué de fondement.
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A l'ouverture de la faillite, le failli perd le pouvoir d'exercer ses droits patrimoniaux et d'en disposer (art. 204 LP). Aussi tous les actes de disposition du failli effectués postérieurement à l'ouverture de la faillite, sans l'accord de l'administration de la faillite, sont-ils nuls; il s'agit cependant d'une nullité relative, dont seuls les créanciers formant la masse passive peuvent se prévaloir, les opérations contraires aux art. 204 ss LP demeurant valables à l'égard tant du failli que de sa contrepartie (arrêt 4C.477/1994 du 23 juin 1995, consid. 1b et les auteurs cités). Au demeurant, la cession de créance dépourvue d'effet sera validée si la restriction du droit de disposer vient à disparaître (ANDREAS VON TUHR/ARNOLD ESCHER, Allgemeiner Teil des Schweizerischen Obligationenrechts, vol. II, p. 331; DANIEL GIRSBERGER, Commentaire bâlois, 3e éd., n. 17 ad art. 164 CO; LACHAT, op. cit., n. 18 in fine).
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Rapportés au cas du bail, ces principes impliquent que, dès le prononcé de sa faillite, le bailleur ne peut plus valablement céder les ![]() ![]() | |
Qu'advient-il des loyers cédés avant l'ouverture de la faillite du bailleur, mais échus postérieurement? Selon la jurisprudence et la doctrine dominante, les créances futures cédées avant l'ouverture de la faillite, mais nées après la déclaration de faillite, tombent dans la masse au sens de l'art. 197 LP (ATF 111 III 73 consid. 3 et les références; pour le surplus, cf. PROBST, op. cit., n. 55/56 ad art. 164 CO, au sujet des différentes opinions professées par la doctrine sur cette question). En conséquence, sitôt la faillite du bailleur prononcée, le cessionnaire des créances concernant des loyers à échoir ne peut plus prétendre les percevoir (LACHAT, op. cit., n. 60 in fine).
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En vertu d'un principe cardinal du droit de la cession de créance, rendu par l'adage nemo plus iuris transferre potest quam ipse habet, la banque cessionnaire n'est ainsi pas devenue titulaire des créances de loyer échues après l'ouverture de la faillite de sieur A. Elle n'a, de ce fait, pas pu les rétrocéder valablement à la demanderesse. Sous les réserves qui seront formulées ci-après, cette dernière ne peut donc pas déduire de l'acte de rétrocession du 15 mai 2001 sa ![]() ![]() | |
En l'espèce, le dossier ne contient aucun élément de fait permettant de savoir de quelle manière il a été procédé à la liquidation de la faillite personnelle de sieur A. et à la réalisation de la part de communauté dont ce dernier était titulaire dans la société simple qu'il formait avec son épouse. Il n'est pas exclu que les démarches entreprises conformément aux susdites prescriptions aient abouti à une entente amiable, en vertu de laquelle les créanciers personnels du failli, supposé qu'ils aient été désintéressés d'une autre manière, auraient renoncé à se prévaloir de l'incapacité de leur débiteur à disposer, conjointement avec son associé, des créances de loyer non encore échues à la date du prononcé de la faillite, voire auraient expressément ratifié la cession de créance litigieuse. De même, l'hypothèse d'une révocation de la faillite en question ne saurait être écartée d'emblée en l'état du dossier. En tout cas, le fait que l'immeuble appartenant aux deux associés a fait l'objet d'une vente apparemment ordinaire, le 2 juillet 1999, tendrait à démontrer que, pour une raison ou une autre, sieur A. n'a, semble-t-il, jamais perdu son pouvoir de disposition relativement à cet immeuble et aux loyers y afférents ou, à tout le moins, l'a recouvré au plus tard à cette date. ![]() | |
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Si les suppositions qui précèdent étaient conformes à la réalité, l'argumentation développée dans le recours en réforme s'en trouverait privée de fondement et le dispositif de l'arrêt attaqué serait correct.
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Certes, en vertu de l'art. 806 al. 3 CC, les actes juridiques du propriétaire relativement à des loyers non échus ne sont pas opposables au créancier qui a poursuivi en réalisation de son gage avant l'époque où ces loyers sont devenus exigibles. Aussi la cession de la créance de loyer afférente au mois de septembre 1998 n'était-elle pas opposable à Z. Cependant, la nullité d'un tel acte de disposition n'était que relative, en ce sens que le créancier gagiste pouvait renoncer à s'en prévaloir (cf. HANS LEEMANN, Commentaire bernois, n. 61 ad art. 806 CC). C'est ce qu'il a fait en l'occurrence en rétrocédant à dame A., en date du 15 mai 2001, l'ensemble des créances de loyer litigieuses, y compris celle relative au mois de septembre 1998. Il n'importe que cette rétrocession ait été opérée en vue du recouvrement de ces créances.
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