12. Extrait de l'arrêt de la IIe Cour de droit public dans la cause X. contre Commune de Fleurier ainsi que Conseil d'Etat du canton de Neuchâtel (recours de droit public) | |
2P.89/2005 du 18 avril 2006 | |
Regeste | |
Art. 27 und 36 BV, Art. 3 BGBM; Verfassungsmässigkeit einer kommunalen Marktordnung, insbesondere der Bestimmung betreffend den gesteigerten Gemeingebrauch.
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Art. 2 Abs. 2 des Reglements, der eine Rangordnung nach der geografischen Herkunft der Interessenten festlegt und damit in wettbewerbsverzerrender Weise stets dieselben Personenkreise bevorzugt, ist mit der Wirtschaftsfreiheit und dem Binnenmarktgesetz nicht vereinbar (E. 3).
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Sachverhalt | |
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Le 14 décembre 2004, le Conseil général de Fleurier a adopté le règlement de l'Abbaye de la commune de Fleurier (ci-après: le Règlement). Le Conseil d'Etat du canton de Neuchâtel (ci-après: le Conseil d'Etat) a approuvé le Règlement par un arrêté du 25 janvier 2005 (ci-après: l'Arrêté).
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L'Abbaye de Fleurier est une foire organisée une fois par année, le week-end précédant la fin de l'année scolaire; elle a lieu à la place de Longereuse et à la rue de la Place d'Armes. L'art. 2 du Règlement, ayant pour note marginale "Ordre de Réservation", dispose:
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"1 Les emplacements pour les marchés forains (carrousels) sont attribués sur la base de contrats spécifiques signés d'une part par les forains et d'autre part par le Conseil communal. ![]() | |
- les sociétés et marchands du village,
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- du district du Val-de-Travers,
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- du canton de Neuchâtel,
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- de Suisse romande,
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- les marchands des autres cantons suisses, pour autant qu'il y ait encore de la place.
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3 L'attribution des places pour les stands et guinguettes n'est pas un droit acquis. La demande doit se faire chaque année."
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Le 2 février 2005, le Conseil communal a répondu à la lettre de X. du 8 décembre 2004, en disant que son inscription serait examinée au regard de la nouvelle réglementation communale, et il lui a envoyé une copie du Règlement ainsi que de l'Arrêté.
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Agissant par la voie du recours de droit public, X. demande au Tribunal fédéral d'annuler l'Arrêté et le Règlement. Il fait notamment valoir que l'art. 2 al. 2 du Règlement viole la liberté économique (cf. art. 27 Cst.), l'égalité de traitement (cf. art. 8 Cst.) et la primauté du droit fédéral (cf. art. 49 Cst.) dans la mesure où il enfreint la loi fédérale du 6 octobre 1995 sur le marché intérieur (LMI; RS 943.02), en particulier l'art. 3 LMI.
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Le Tribunal fédéral a partiellement admis le recours dans la mesure où il était recevable; il a annulé l'art. 2 al. 2 du Règlement et l'Arrêté dans la mesure où il se rapportait à cette disposition.
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2.1 Selon l'art. 27 al. 1 Cst., la liberté économique est garantie. Elle comprend notamment le libre choix de la profession, le libre accès à une activité économique lucrative privée et son libre exercice (art. 27 al. 2 Cst.). Cette liberté protège toute activité économique privée, exercée à titre professionnel et tendant à la production d'un gain ou d'un revenu (cf. le message du Conseil fédéral du 20 ![]() ![]() | |
Aux termes de l'art. 36 al. 1 Cst., toute restriction d'un droit fondamental doit être fondée sur une base légale; les restrictions graves doivent être prévues par une loi; les cas de danger sérieux, direct et imminent sont réservés. Toute restriction d'un droit fondamental doit être justifiée par un intérêt public ou par la protection d'un droit fondamental d'autrui (art. 36 al. 2 Cst.) et proportionnée au but visé (art. 36 al. 3 Cst.). L'essence des droits fondamentaux est inviolable (art. 36 al. 4 Cst.).
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La jurisprudence a encore établi que l'égalité de traitement entre concurrents directs, c'est-à-dire entre personnes appartenant à une même branche économique qui s'adressent au même public avec des offres identiques pour satisfaire le même besoin (ATF 125 II 129 consid. 10b p. 149 et la jurisprudence citée), découlant de l'art. 27 Cst. n'était pas absolue et autorisait des différences à condition que celles-ci répondent à des critères objectifs et résultent du système lui-même; il est seulement exigé que les inégalités ainsi instaurées soient réduites au minimum nécessaire pour atteindre le but d'intérêt public poursuivi (arrêts 2P.83/2005 du 26 janvier 2006, consid. 2.3, et 2A.26/2005 du 14 juin 2005, consid. 4.2; cf. aussi ATF 125 I 431 consid. 4b/aa p. 435/436 appliquant l'art. 31 aCst.).
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Sont enfin prohibées les mesures de politique économique ou de protection d'une profession qui entravent la libre concurrence en vue de favoriser certaines branches professionnelles ou certaines formes d'exploitation (ATF 125 I 209 consid. 10a p. 221 et la jurisprudence citée).
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2.2 Selon l'art. 664 al. 1 CC, les biens du domaine public sont soumis à la haute police de l'Etat sur le territoire duquel ils se trouvent. Par conséquent, les cantons ou les communes peuvent réglementer l'usage qui en est fait par les privés. Ainsi, ils sont en principe libres de décider par qui et à quelles conditions le domaine public peut être utilisé. Cependant, la jurisprudence a reconnu aux administrés un droit conditionnel à l'usage accru du domaine public à des fins notamment commerciales (ATF 128 I 295 consid. 3c/aa p. 300 et la jurisprudence citée), comme l'installation d'un stand dans une foire. Une autorisation ne peut être refusée que dans le respect des droits fondamentaux, en particulier de l'égalité (art. 8 Cst.) ainsi que de la liberté économique (art. 27 Cst.) notamment sous l'angle ![]() ![]() | |
Il convient également de prendre en considération la loi fédérale sur le marché intérieur. En fait, cette loi ne résout pas le problème particulier des choix à opérer lorsque la place disponible est ![]() ![]() | |
3. La commune de Fleurier met à disposition la place de Longereuse et la rue de la Place d'Armes pour sa foire annuelle, l'Abbaye de Fleurier. Ladite commune invoque des motifs pertinents de sécurité et de tranquillité publiques pour ne pas étendre davantage le périmètre de cette fête. Il n'en reste pas moins qu'une telle délimitation ne permet pas forcément de satisfaire toutes les demandes de places pour dresser un stand ou une guinguette, ce qui oblige alors à opérer des choix entre les différents intéressés. L'art. 2 al. 2 du Règlement établit l'ordre dans lequel ces demandes doivent être satisfaites, en favorisant surtout les sociétés locales. En effet, cette disposition permet d'attribuer des emplacements pour des stands d'abord aux sociétés et marchands du village, puis elle élargit le cercle à ceux (1) du district du Val-de-Travers, (2) du canton de Neuchâtel, (3) de Suisse romande et enfin (4) des autres cantons suisses. Lors de l'Abbaye de Fleurier, l'activité des sociétés locales consiste à tenir des stands où est vendue de la marchandise; en effet, la commune de Fleurier n'allègue pas que ces sociétés dresseraient des stands pour présenter leur activité et ne vendraient que très accessoirement des marchandises. En tant que les produits vendus à ces stands sont analogues à ceux du recourant, on peut dire que ces sociétés sont des "concurrents directs" du recourant; tel ne serait pas le cas, en revanche, dans la mesure où ces sociétés locales vendraient des produits différents de ceux du recourant. L'ordre établi par l'art. 2 al. 2 du Règlement permet d'attribuer les emplacements pour des stands où l'on vend des produits semblables à ceux du recourant, lorsqu'il n'y a pas suffisamment de places pour tous les marchands et sociétés qui désirent en vendre. L'art. 2 al. 2 du Règlement prévoit ainsi une intervention contraire à la liberté économique et aux principes consacrés par la loi fédérale sur le marché intérieur, car il instaure un mécanisme privilégiant systématiquement les mêmes groupes de candidats; n'étant pas neutre sur le plan économique, il fausse la concurrence. Cette appréciation est en tout cas valable pour la préférence donnée dans l'ordre aux sociétés et marchands du district du Val-de-Travers, du canton de ![]() ![]() | |