25. Arrêt du 14 juin 1957 dans la cause Administration fédérale des contributions contre Société financière et hypothécaire Concordia SA | |
Regeste | |
Art. 49 Abs. 1 WStB.
| |
Sachverhalt | |
![]() ![]() ![]() | |
L'autorité de taxation ajouta au bénéfice de l'exercice de 1952 une certaine somme à titre de "bénéfice sur actions gratuites Shell". Concordia forma une réclamation sur ce point notamment, mais elle fut déboutée, le 14 novembre 1955. Elle déféra l'affaire à la Commission genevoise de recours laquelle, statuant le 17 juillet 1956, modifia la taxation "en ce sens que la somme .... représentant la valeur des actions Shell reçues gratuitement en 1952 est éliminée" dans le calcul du bénéfice net imposable. Cette décision est motivée en bref comme il suit:
| |
C'est seulement pour les personnes physiques non astreintes à tenir des livres que la valeur des actions gratuites nouvellement attribuées constitue un revenu imposable (RO 70 I 319 ss; 80 I 40). Au contraire elle ne s'ajoute pas au bénéfice net imposable des personnes morales astreintes à tenir des livres (Archives de droit fiscal suisse, t. 16, p. 49). L'arrêt précité concerne l'impôt sur les bénéfices de guerre, mais la même solution s'impose en matière d'impôt pour la défense nationale. Bien que la différence ainsi faite entre deux classes de contribuables ne soit pas satisfaisante du point de vue fiscal, la Commission cantonale n'entend pas déroger à la jurisprudence, instituée dans un cas tout à fait analogue à celui de la recourante.
| |
B.- Contre cette décision, l'Administration fédérale des contributions (en abrégé: l'Administration) a formé un recours de droit administratif. Son argumentation, dans son recours et sa réplique, se résume comme il suit:
| |
L'arrêt invoqué par la Commission genevoise (Archives de droit fiscal suisse, t. 16 p. 49) a été rendu en matière d'impôt sur les bénéfices de guerre et ne saurait faire jurisprudence en l'espèce, s'agissant de l'impôt pour la défense nationale; le système de ces deux impôts n'est pas le même. Le premier a son assiette sur la différence entre le ![]() ![]() | |
Concordia SA conclut au rejet du recours.
| |
D.- A la demande du juge délégué, l'Administration a précisé encore, le 4 mars 1957, que, d'après les instructions qu'elle a données, la plupart des cantons imposent, au titre de l'impôt pour la défense nationale, le bénéfice qui résulte, pour l'actionnaire, de la distribution d'actions gratuites. Des difficultés se sont produites, mais seulement dans un petit nombre de cantons "qui n'imposent pas les actions gratuites en droit fiscal cantonal, auxquels il y a lieu d'ajouter Fribourg".
| |
Du fait, cependant, qu'une prestation est appréciable en argent et constitue un rendement de la fortune, on n'est pas fondé à conclure qu'elle soit imposable lorsque son bénéficiaire est une société anonyme, de même que lorsqu'il s'agit d'une personne physique non astreinte à tenir des livres. Car l'assiette de l'impôt diffère fondamentalement d'un cas à l'autre. Dans le second cas, il s'agit d'une imposition du revenu. D'après la définition qu'en donne l'art. 21 AIN, le revenu comprend sans aucun doute la valeur des actions gratuites. Dans le premier cas, il ne s'agit pas de revenu et l'art. 21 AIN n'est pas applicable. L'impôt ![]() ![]() | |
En effet, l'art. 667 CO interdit seulement aux sociétés anonymes de porter en compte leurs papiers-valeurs pour ![]() ![]() | |
Selon le premier mode d'évaluation, la différence entre la valeur vénale des titres au début et à la fin de l'exercice influence le résultat. Ainsi, lorsque la société reçoit des actions gratuites, leur valeur nominale, pas plus que leur nombre, n'entre en ligne de compte, mais seulement la valeur globale de la participation au début et à la fin de l'exercice. La différence entre ces deux valeurs sera portée au compte de pertes et profits, qu'elle soit due à la distribution d'actions gratuites ou à n'importe quelle autre cause, peu importe. Il y aura bénéfice ou perte sur la participation selon que la valeur en bourse de l'ensemble des actions anciennes et nouvelles sera supérieure ou inférieure au montant pour lequel la participation était portée en compte à la fin de l'exercice précédent.
| |
Si la société n'a porté en compte que le prix d'acquisition, elle n'a pas à augmenter la somme inscrite au bilan lorsqu'elle reçoit des actions gratuites. Le prix d'acquisition demeure inchangé. La prestation reçue apparaît aussi comme l'équivalent du prix payé pour les titres anciens. Peu importe qu'elle ait augmenté la valeur nominale de la participation et qu'à la fin de l'exercice, la valeur boursière des actions anciennes et nouvelles soit supérieure ou inférieure à celle des actions anciennes au début de l'exercice.
| |
3. - La différence dans les systèmes d'imposition applicables d'une part aux personnes physiques non ![]() ![]() | |
S'agissant de l'imposition des actions gratuites, la personne physique non astreinte à tenir les livres devra, dès leur distribution, en soumettre la valeur à l'impôt sur le revenu. Elle ne peut échapper à cette taxation, mais, par la suite, les augmentations ni les diminutions de valeur des titres ne se répercuteront sur son revenu imposable. La société anonyme qui a choisi de porter en compte la valeur vénale de ses titres (cours en bourse) sera, elle aussi, imposable, mais au titre du bénéfice net, sur la valeur des actions gratuites, dès le moment où elle les a reçues, supposé que la valeur totale de sa participation ait augmenté. Cependant, les variations ultérieures des cours se répercuteront encore sur son bénéfice net. Enfin, la société anonyme qui n'a porté en compte que la valeur d'acquisition échappe à l'impôt, provisoirement du moins, bien qu'elle ait effectivement reçu une prestation appréciable en argent. Mais la valeur imposable de cette prestation apparaîtra nécessairement lors de la liquidation soit des titres, soit de la société propriétaire elle-même. Cependant, elle peut avoir énormément varié dans l'entretemps, de sorte que, lors de l'imposition, elle peut être soit réduite à zéro par la faillite de la société émettrice, soit augmentée dans une proportion considérable par rapport à ce qu'elle était lors de l'émission. Dans le premier cas, la société anonyme aura exceptionnellement échappé à l'impôt. Dans le second, elle risque de payer plus qu'elle n'aurait fait si elle avait porté en compte la valeur vénale.
| |
Toutefois, ces différences dans les taxations ne sont extrêmes que dans des cas exceptionnels. La société anonyme ne peut, de plus, en jouer pour éluder l'impôt. Elle en est empêchée du fait qu'elle doit choisir son système d'évaluation une fois pour toutes; elle n'en peut changer pour se procurer des avantages fiscaux.
| |
Les différences dont il s'agit sont du reste inhérentes au ![]() ![]() | |
On ne saurait objecter que, sur l'imposition des actions gratuites, la loi présenterait une lacune qu'il appartiendrait au juge de combler. Le problème de cette imposition, qui se pose fréquemment, a une importance pratique manifeste. Il n'a en tout cas pas pu échapper à l'attention du législateur lors des diverses revisions dont l'arrêté du Conseil fédéral du 9 décembre 1940 a fait l'objet.
| |
L'Administration objecte en outre qu'une comptabilité contraire au droit doit être rectifiée par le fisc. Mais on a montré que la mise en compte des titres cotés pour la valeur d'acquisition n'est pas illégale, pourvu que cette valeur ne dépasse pas le cours moyen dans le mois qui précède la date du bilan (art. 667 al. 1 CO). Dans la mesure où cette mise en compte entraînerait la création d'une réserve tacite, cette réserve, créée par une évaluation licite, ne serait imposable qu'au moment de sa réalisation. Enfin, le Tribunal fédéral ne peut tenir compte de la solution que la recourante dit avoir adoptée et que la plupart des autorités cantonales auraient imposée dans leur pratique. Cette solution n'est pas fondée en droit et ne peut être maintenue.
| |
4. - Dans la présente espèce, Concordia a porté ses titres en compte pour leur prix d'acquisition. Il n'est pas ![]() ![]() | |
Par ces motifs, le Tribunal fédéral:
| |